Mes amours francophones : 10-1
10. Nino Ferrer L’arbre noir (1979)
On sait que chez Nino Ferrer – à son grand désespoir – les tubes rigolards ont trop souvent caché une forêt profonde et luxuriante, emplie d’ombres et de noirceurs. Au cœur de cette forêt trône cet Arbre noir majestueux et bouleversant, qui vient toiser de sa ramure le pourtant très réussi album Blanat. C’est une chanson que Ferrer a porté en lui longtemps, le texte l’ayant accompagné près de vingt ans avant qu’il ne parvienne à lui donner l’habillage musical qui lui convienne. Ce sera finalement dans ce château du Lot (à Blanat) – flanqué notamment du guitariste Mickey Finn – que cet éternel insatisfait livrera sans doute son meilleur morceau, intense et bouillonnant. Commençant comme une ballade emplie de mélancolie inquiète, le morceau se charge peu à peu de tension électrique qui s’évacue brusquement dans un déferlement survolté passées les deux minutes. Mickey Finn délivre un solo habité et vibrant qui fait trembler jusqu’aux fondations de la chanson, tandis que la section rythmique avance avec un mélange de souplesse et de compacité. Par-dessus le marché, Nino Ferrer écrit un de ses textes les plus poignants, perclus de cette tristesse infiniment chevillée à son corps (au hasard, ces quelques lignes : « Il flotte comme un goût de sommeil / Ou de tristesse, je ne sais comment / Ce n’est peut-être que le temps / Qui passe et laisse une poussière / De rêves morts et d’illusions /Peut-être est-ce ton absence, mon cœur »). Au final, la chanson laisse l’auditeur proprement soufflé, noyé sous une grande vague d’émotions fortes. Un arbre impossible à abattre.
- L’arbre noir
- Et aussi : Little Lili
- Bonus : On dirait Nino Ferrer, un film documentaire de Caterina Profili
9. Diabologum La maman et la putain (1996)
Sur cet album fondamental dont il a déjà été largement question dans ce compte à rebours, les Toulousains de Diabologum atteignaient des sommets d’intensité en choisissant de se taire et de faire entendre littéralement une autre voix que la leur. Comme ils l’avaient déjà fait avec un extrait de Sailor & Lula de David Lynch sur leur premier LP paru deux ans plus tôt, Arnaud Michniak et Michel Cloup entreprennent ici de mettre en musique une scène de film emblématique, en l’occurrence le monologue de Veronika (interprétée par Françoise Lebrun) qui se trouve à la fin du chef-d’œuvre de Jean Eustache, La maman et la putain. Ce monologue sidérant, à la fois trouble et lumineux, pétri de fulgurances et d’incohérences, n’avait pas besoin de cette relecture pour scotcher le spectateur mais l’apport de ces torrents d’électricité bouillonnants met encore davantage en relief ses aspérités les plus coupantes. Colère, tristesse, ironie : la mise en son des Toulousains sculpte l’électricité pour épouser chacune des inflexions de la voix de Veronika/Françoise Lebrun. Des guitares en fusion du duo coulent une sorte de fleuve de lave dont les éclaboussures brûlantes laissent sur nos peaux et nos oreilles des marques rougies par le feu. On n’en sortira jamais.
- La maman et la putain
- Et aussi : à voir ici les retrouvailles sur scène entre Françoise Lebrun et Diabologum lors d’un concert de reformation donné en 2012 aux Rockomotives de Vendôme
- Bonus : un article de Charlotte Cayeux sur le jeu de Françoise Lebrun dans La maman et la putain
8. Jacques Brel La ville s’endormait (1977)
Dernière occasion pour moi de faire mention de cet époustouflant disque de fin de parcours, La ville s’endormait en constitue sans doute l’acmé crépusculaire. Tandis que les feux du soleil couchant dardent leurs rayons sur un horizon d’errance, Brel semble vêtir à nouveau les oripeaux du Quichotte qu’il interprétait près de dix ans plus tôt. Mais le chevalier à la triste figure a vieilli et arpente sur son « cheval fourbu » un paysage fantomatique, où rien ne semble plus familier. Le panache des combats passés apparaît bien lointain et ne demeurent que solitude et lassitude, parfois troublées par la magnificence des choses. Le vieux guerrier est bien encore capable de soubresauts pour maudire ses amours passées mais la fatigue reprend vite le dessus, et la fin approche inéluctablement. Brel cisèle une fois de plus un texte d’une beauté supérieure tandis que les arrangements dessinent autour de lui une étendue étale, soudain illuminée d’un éclat de lumière. Et la splendeur de l’ensemble vient de surcroît se rehausser d’une touche de mystère, par la grâce d’un dernier vers dont on ne sait s’il évoque un souvenir ou une hallucination : « Et vous êtes passée, demoiselle inconnue, à deux doigts d’être nue, sous le lin qui dansait ».
- La ville s’endormait
- Et aussi : Voir un ami pleurer
- Bonus : « Les Marquises, dernier album de Jacques Brel, a 40 ans », rencontre avec la fille de Jacques Brel, France Brel, pour un reportage de la RTBF du 17 novembre 2017
7. Serge Gainsbourg Melody (1971)
Dès l’intro, la basse – et quelle basse ! – et la guitare électrique mettent en branle un lent panoramique avant que n’entre dans le cadre cette Rolls Silver Ghost devenue mythique, dans laquelle nous fait monter illico presto le parlé-chanté gainsbourien par la grâce d’un fabuleux alexandrin d’ouverture. C’est parti pour plus de sept minutes d’une rêverie cinématographique audacieuse et intrigante, la première scène inoubliable de cette relecture gainsbourienne du Lolita de Nabokov. Gainsbourg apparaît ici grand maître de ses effets, laissant derrière lui les petites perles pop offertes des années durant à d’innombrables interprètes pour se lancer tête la première dans une aventure hors normes, disque symphonique et érotique sur laquelle il entend donner libre cours à ses ambitions musicales. Aux côtés de Jean-Claude Vannier, qui tresse ici de vertigineux arrangements de cordes, Gainsbourg plante donc dès l’entame ce formidable chef-d’œuvre ancré dans une sorte de dimension parallèle, errance automobile urbaine autant que voyage dans le labyrinthe de la psyché du narrateur. Les cordes, la basse et la guitare constituent les sommets d’un fascinant triangle des Bermudes se répondant sans cesse pour poser les bases du drame qui s’annonce dans un dérèglement des sens de toute beauté. J’aurais aussi bien pu classer ici le non moins fabuleux Cargo culte final, double maléfique et sauvage de cette incomparable Melody, mais j’avoue mon éblouissement infini pour l’incroyable alchimie trouvée ici. De Beck à Nick Cave, de Dean Wareham à Portishead, l’influence des plans dessinés là par Gainsbourg et Vannier demeure incalculable.
- Melody
- Et aussi : Cargo culte
- Bonus : De Ginsburg à Gainsbourg, Serge Gainsbourg par Melody Nelson, émission diffusée le 4 juillet 2016 sur France Inter
6. Françoiz Breut Km 83 (2005)
C’est une chanson qui commence comme un reflet troublé dans l’eau, par quelques accords de guitare qui ondoient. Puis le chant unique de Françoiz Breut prend possession du morceau et lance cette invite troublante, ce « rendez-vous à la renverse » dont je ne me suis jamais remis depuis que j’ai eu la chance de l’entendre. Par la grâce de ces quelques mots, Françoiz Breut m’attrape et me plante une épine dans le cœur, cœur que le reste de la chanson finira de faire se craqueler. La chanson avance tel un ciel de nuages, mêlant dans ses mélodies et ses harmonies – d’où émerge un divin banjo – les promesses et la mélancolie, la tristesse et l’irréalité, le désir et la consolation, la flamme et la résignation. Il y a tout cela dans Km 83, et la preuve que les chansons dépassent parfois de beaucoup ce qu’elles semblent vouloir dire. Il y a des larmes versées, il y a des frissons. Il y a plus que je ne pourrais jamais écrire.
- Km 83
- Et aussi : Marie-Lise
- Bonus : retranscription de la conférence de presse donnée par Françoiz Breut le 20 avril 2005 à l’occasion de son passage au Printemps de Bourges
5. Alain Bashung Fantaisie militaire (1998)
Elles ne sont pas fréquentes les chansons dont on se rappelle précisément le moment de la première écoute. Pour Fantaisie militaire (le morceau donc), j’ai gardé le souvenir très clair de cette première fois : la chanson ouvrait en avant-première de la sortie de l’album l’émission de l’incontournable – et lui-même inconditionnel de Bashung – Bernard Lenoir sur France Inter. J’en suis resté bouche bée. Tout révélait le chef-d’œuvre immédiat : le fascinant crescendo introductif, ces mots de désamour hébété (« Soldat sans joie, va, déguerpis / L’amour t’a faussé compagnie ») et cette incroyable déflagration de guitares électriques dont je n’avais jamais entendu d’équivalent dans la chanson d’ici. Bashung – et son fidèle parolier Jean Fauque – reprend le parallèle entre l’amour et le champ de bataille, se mettant ici en scène en fantassin déserté autant que déserteur, abandonné dans un no-man’s land sans boussole ni feuille de route. A ce titre, Fantaisie militaire la chanson est le parfait reflet de Fantaisie militaire l’album, disque né sur les cendres d’une dépression carabinée de son auteur et d’une séparation amoureuse. Chanson irradiée de somnambulisme électrique, Fantaisie militaire crée une formidable réaction en chaîne en mêlant l’ombre et la lumière, fait de son désespoir le combustible d’une prodigieuse explosion créative. Brûlante et inspirante, Fantaisie militaire – comme l’album du même nom – demeure plus de vingt ans après une pierre angulaire unique de mon Panthéon musical, comète noire continuant de voler haut dans mon firmament. Comme l’avait dit exactement Bernard Lenoir après avoir diffusé le morceau : « Un must ! ».
- Fantaisie militaire
- Et aussi : Mes prisons
- Bonus : entretien avec Pierre Lemarchand, auteur il y a deux ans d’un ouvrage entièrement consacré à Fantaisie militaire dans la collection « Discogonie » aux éditions Densité
4. Mendelson 1983 (Barbara) (2008)
J’aurais aimé trouver les mots justes pour vous parler de 1983 (Barbara), essayer de vous raconter tout ce qui se passe durant les onze minutes et vingt-sept secondes de cette chanson-fleuve, ce flot dylanien qui coule et coule encore, vous dire la gorge serrée, les sanglots qui montent, l’incessant va-et-vient entre souvenirs et sensations, vécu et ressenti, vous dire que Mendelson a réussi le miracle de mettre l’enfance en chanson. Et puis, rien de ce que j’écrirai ne sonnerait vraiment juste, rien ne serait mieux que les quelques lignes écrites par François Gorin que vous pourrez lire ci-dessous. Je garderai donc tout cela pour moi et vous conseillerai simplement d’écouter vous aussi, d’écouter ça tout seul et peut-être que vous comprendrez.
- 1983 (Barbara)
- Et aussi : Marie-Hélène
- Bonus : 1983 (Barbara) par François Gorin
3. Alain Bashung La nuit je mens (1998)
A l’approche du bilan de ce compte à rebours qui m’occupe depuis maintenant plusieurs mois, Fantaisie militaire s’impose comme le seul album à faire figurer trois extraits dans le classement. Joyau parmi les joyaux, La nuit je mens brille d’un inaltérable éclat et semble se hisser un peu plus avec le temps comme un classique absolu de la chanson d’ici, réconciliant amateurs de variétés françaises et esthètes rock. Chef-d’œuvre d’un artiste hors normes, La nuit je mens est aussi une formidable réussite collective à mettre au crédit de l’incomparable talent de Bashung à tirer ses collaborateurs vers le haut. Toute l’équipe qui l’entoure évolue ainsi à son sommet, des plus que précieux Valentins à la composition à Jean Fauque aux textes en passant évidemment par l’immense Joseph Racaille aux arrangements de cordes. Le résultat est cette chanson aérienne et grandiose, ouverte aux quatre vents et à mille interprétations, multipliant les images marquantes et les figures libres en haute altitude. Grand huit et saut dans le vide, La nuit je mens est une des choses les plus enivrantes et bouleversantes qui soient, extraordinaire appel d’air permettant de toiser tous les horizons.
- La nuit je mens
- Et aussi : Comme un Lego
- Bonus : l’excellente Rebecca Manzoni revenait sur les mystères insolubles de cette chanson dans son Tubes & co du 15 mars 2019
2. Dominique A Le sens (2009)
Après Bashung, il ne vous semblera pas anormal qu’un autre habitué de ce classement tienne le (très) haut du pavé. Mon amour pour l’œuvre de Dominique A est maintenant largement dévoilé et parmi toutes les grandes chansons composées par le bonhomme, celle-ci sort encore du lot pour faire vibrer les plus sensibles de mes cordes. Avec une économie de moyens ramenant son auteur à la pop synthétique de ses débuts, Le sens ouvre le remarquable album La musique et s’inscrit à l’évidence comme un des grands incipits de la pop et du rock, en français ou autre. Avec cette chanson rien moins que métaphysique, Dominique A parvient à creuser au plus profond des questions existentielles qui demeurent pour moi irrésolues sans une once de pesanteur ou d’écrasant pathos. Bien au contraire, Le sens donne à voir toutes les nuances de la béance, dépeignant avec une étonnante douceur les rivages du vide qui souvent nous étreint. Loin de l’angoisse et du vertige, cette quête de sens – toujours déçue – laisse ouverte le champ des expériences et l’angoisse pascalienne se transforme ici en délicat frisson, courant d’air qui à l’occasion nous rappelle que nous aussi, nous n’avons toujours pas trouvé. On vivra sans doute avec ou plutôt sans, et la beauté du monde n’en sera pas moins là. Et si parfois une larme coulera sur nos joues à l’écoute du Sens, on en fredonnera aussi souvent la tendre mélodie comme on aimera sentir l’eau sur notre peau ou le vent sur notre visage.
- Le sens
- Et aussi : La musique
- Bonus : Dominique A en entretien pour Les Inrocks en août 2009 à l’occasion de la sortie de La musique
1. Léo Ferré La mémoire et la mer (1970)
Vous pourrez peut-être y lire quelque chose de mon rapport à la chanson française mais toujours est-il que le sommet de ce classement sera bel et bien occupé par un morceau balançant davantage du côté de la littérature que de la musique pop. Certains moqueront sans doute mon défaut d’originalité mais pour être honnête, la présence de La mémoire et la mer sur la plus haute marche de mon podium s’est – dès le début de ce projet – imposée à moi comme une implacable évidence. Composée de dix strophes d’octosyllabes d’une beauté sans égale, La mémoire et la mer navigue dans les souvenirs troubles de Ferré et en ramène des lambeaux d’écume et des embruns de nostalgie. Fruit de dix ans de travail et de réécritures, La mémoire et la mer irrigua nombre de morceaux de Ferré qui recycla fréquemment des strophes entières rejetées de la version finale pour nourrir d’autres projets. Elle constitue ainsi une forme de sous-bassement à l’œuvre du chanteur-poète, sol désolé mais incroyablement fertile dans lequel d’autres musiciens férus de poésie spectrale viendront puiser (Thiéfaine en tête). Construite sur un arpège de piano très semblable à celui d’Avec le temps, la chanson demeure musicalement d’une parfaite sobriété, les arrangements de Jean-Michel Defaye s’employant à souligner sans les noyer les images évoquées par Ferré, ce texte au bouleversant roulis qui n’a de cesse de chambouler et de hanter l’auditeur. La mémoire et la mer s’écoute seul et s’écoute rarement car sa beauté n’est ni joyeuse ni partageuse. Elle fait partie de ces hymnes solitaires et graves composés par Ferré au long de sa carrière, ces gouttes de spleen jaillies de l’encre de sa plume, pierres noires qu’on garde au fond du cœur, où l’on cache nos plus impénétrables solitudes. « C’est fini, la mer, c’est fini / Sur la plage le sable bêle / Comme des moutons d’infini / Quand la mer bergère m’appelle… »
- La mémoire et la mer
- Et aussi : La vie d’artiste
- Bonus : émission en deux épisodes des Greniers de la mémoire sur France Musique consacrée à Léo Ferré (octobre 2013)
Voilà, ce classement débuté fin novembre 2018 prend fin neuf mois plus tard. Je n’aurai pas pensé la gestation si longue, je vous assure y avoir consacré un temps non négligeable au vu de mes disponibilités et j’avoue ne pas être mécontent de pouvoir passer à autre chose même si j’ai beaucoup apprécié l’exercice – plus difficile que je n’aurai cru. Il est fort probable que je modifierais l’ordre du classement dès à présent si je devais recommencer mais c’est le jeu. Le plus intéressant aura bien été de me confronter à mes propres goûts, de les réévaluer, de les bousculer ou de les confirmer, sans chercher à trop rationaliser le tout. J’espère que les quelques lecteurs et lectrices qui auront eu le courage de suivre le compte à rebours auront apprécié l’exercice. Rien ne les empêche de s’y prêter à leur tour si le cœur leur en dit. Ce blog va rentrer dans sa période de pause estivale et revenir certainement dans quelques semaines. Bien à vous.
On ne peut pas tout connaître, avoir tout écouté. En découvrant votre liste, je pensais à celle que je pourrais faire, où figurerait tout en haut Bashung (« Aucun express ») et Manset (« Le langage oublié »). Il y aurait du Thiéfaine pas loin (inexistant chez vous) et Graeme Allwright (« Viendras-tu avec moi »), en plus de Brel et de Françoise Hardy, abondants chez vous (pas négliger l’album « Le danger », le meilleur de Françoise Hardy après « La question »). Mais vous ignorez Serge Reggiani, Jean Ferrat, Jean-Roger Caussimon, Arno ! Un Adamo aurait sa place dans mon classement (« Inch Allah » ?). Mais il y aurait aussi du Polnareff, du Souchon (« S’assoir par terre », « La beauté d’Ava Gardner »). J’y mettrais un peu de Jeanne Balibar (« Le tour du monde »), du Kat Onoma (« Lady M », « Le désert »). Il y aurait, pour l’enfance, du Gérard Lenorman, son poète gentil (« Les matins d’hiver », « Quelque chose et moi »), un peu de Julien Clerc (« Le patineur », « This melody »). Jonasz en serait (« Les vacances au bord de la mer ») et Yves Simon avec plus d’un titre. Il y a des merveilles dans les deux ou trois premiers albums de Catherine Lara (« Le reflet mauve des forêts »). Véronique Sanson aussi. Il faudrait aussi faire de la place aux Québécois : Gilles Vigneault (« Pendant que »), Charlebois, Leclerc (« Le tour de l’Île », somptueux), Louise Forestier (« Quand té pas là »), Beau Dommage. Je vois aussi figurer Christophe, mais avec au moins 5 titres, dont « La petite fille du troisième » avec sa basse entêtante et sa rythmique dramatique. Et des groupes comme les Suisses de Young Gods (« Crier les chien » ?), Les Wampas (« Vie, mort et résurrection d’un papillon »), une goutte de Négresses Vertes et du Complot Bronswick (« La guerre est déclarée », puisqu’il faut un titre en français). Et alors, du Ange, à volonté, comme le feu des guerriers (« Sur la trace des fées », « Jour après jour », etc.). Rayon Brassens, il y aurait ma préférée, la seule de son répertoire qui ne soit pas de lui : « heureux qui comme un Ulysse », qui me fout à chaque fois le frisson. Et alors Dick Annegarn aurait aussi sa place dans ce classement, sinon avec le rebattu « Bruxelles », avec « Coutances », « L’orage » et « Albert ». Une place serait faite à Jeanne-Marie Sens, Nicole Rieu à la voix cristalline, Isabelle Mayereau et Catherine Ribeiro. Enfin, il faudrait voir à faire figurer l’un ou l’autre de ces inconnus talentueux des années 60 comme Noël Deschamps ou Michel Héron (l’incroyable « Les commissions »). Et puisqu’il est question de ces années, Antoine mériterait une petite place aussi, ainsi que Bécaud, au moins pour « Un peu d’amour et d’amitié », voire « L’Indien ». Et tous ceux qu’on oublie, ceux qu’on ne connaît pas, qu’on ignore parfois délibérément…