L’écume des jours
Real Estate Days (2011, Domino)
C’est dans le New Jersey – État prolifique en songwriters de choix, des Feelies à Yo La Tengo – que se forme Real Estate en 2008 autour du duo Martin Courtney (chant, guitare) / Matt Mondanile (guitare). Le groupe publie un premier opus en 2009, Real Estate, qui lui procure déjà une certaine reconnaissance dans les sphères critiques mais que j’avoue ne pas avoir l’heur de connaître. Deux ans plus tard, le quatuor, désormais hébergé chez le prestigieux label Domino (The Kills, The Last Shadow Puppets, Franz Ferdinand entre de nombreux autres), fait paraître ce deuxième album.
Back when we had it / So easy / I would surrender / Completely / I built a shelter / For green beings / In the sun, in the sun
Easy
Au premier abord, on pourrait penser que la pop à guitares de Real Estate ne paie guère de mine. Le disque déroule ses 10 chansons sans variation de style marquée et ses mélodies fluides et lumineuses s’écoulent en source tiède au creux de nos oreilles. Au final, on pourrait penser que rien ne s’est produit mais ce serait sans compter sur le formidable pouvoir de séduction de ces airs faussement anodins. Après quelques écoutes, on s’aperçoit que ces chansons ont proprement colonisé notre cerveau, et on sifflote sans y prendre garde du matin au soir ces Easy et ces Out of tune. Et de ce lavis presque monochrome se dégage de bien beaux chatoiements.
The houses were humming all through the night / The winter was coming but that was alright
Green aisles
Avec ses entrelacs de guitares, Real Estate livre ainsi un disque aux vertus quasi amniotiques, dont la douce nostalgie enveloppe l’auditeur comme une brume chaude. Et l’on se laisse bercer par ces chansons rêveuses comme un soir de printemps, emplies de petits papillons bleu. Dans ses meilleurs moments, Days évoque les premières heures cotonneuses de R.E.M. ou les Feelies bucoliques de l’intouchable The good earth, comme sur l’impeccable Wonder years. Et bien que hors des modes et hors du temps, Real Estate réussit à composer d’impeccables pop-songs, séduisantes et vibrantes, comme ce Easy inaugural ou ce Green aisles qui porte en lui (toutes proportions gardées) quelque chose de l’évanescence grandiose des Smiths. A l’occasion, le groupe sait même faire décoller ses chansons de façon inattendue, tel ce génial Out of tune qui renvoie à la superbe des Stone Roses ou le All the same conclusif et sa suite d’arpèges hypnotiques qui l’étire sur plus de sept minutes. Alors certes, les tendances monochromes du disque nuisent à la saveur de certains morceaux, les plus fades Younger than yesterday ou Three blocks mais Real Estate n’en livre pas moins un disque intrigant et addictif.
And I’m not OK / But I guess I’m doing fine
Wonder years
Et l’on aimera au bout du compte se lover dans la douce litanie de ces jours de bonheur et d’ennui, comme on prolonge encore la chaleur du matin après le premier réveil, le corps et l’esprit gourds, un rêve encore à portée de main.
2 réponses
[…] du New Jersey nous avaient déjà laissé une fort belle impression avec leur premier opus, Days, paru en 2011. Les voilà de retour en ce début d’année et depuis que j’ai posé mon […]
[…] nos humeurs incertaines, un chantre lumineux de la douceur mélancolique. Sur son deuxième album, Days, Out of tune est sans doute le morceau le plus emblématique, avec ses entrelacs de guitares en […]