De beaux dimanches
The Sundays Reading, writing and arithmetic (1990, Rough Trade)
Jeune couple originaire de Bristol, Harriet Wheeler et David Gavurin forment les Sundays en 1987. Il ne leur faudra pas plus d’un concert dans un club de Camden pour susciter l’émoi de la presse spécialisée et de nombre de directeurs artistiques du pays. Le groupe atterrit finalement chez le prestigieux label Rough Trade qui publie en 1990 cet alors très attendu premier album, Reading, writing and arithmetic. Trop jeune et éloigné des choses de la pop pour découvrir le groupe à l’époque, ce n’est que bien plus tard que j’eus l’occasion de poser l’oreille sur ce disque.
Said oh, my hopeless youth it’s so unclean / Said oh, and I’d, I’d like to be in history
Hideous towns
J’avoue avoir toujours éprouvé certaines préventions envers la musique des Sundays. Comme le laisse présager le titre du disque, l’ensemble se révèle trop souvent un brin scolaire pour véritablement m’emporter. Ça sent un peu trop la chambrette d’étudiant-e en classe prépa, rêvassant sur l’amour entre deux dissertations. Mais pour être clairement un groupe mineur, les Sundays ont su, au gré d’une poignée de chansons comme de petits miracles, atteindre en nous quelques points sensibles. Ces mélodies fluides et évanescentes, ces arpèges carillonnantes droit sorties du petit Johnny Marr illustré, le chant sensible et décidé d’Harriet Wheeler et la fraîcheur mélancolique émanant de l’ensemble ont su toucher au cœur une génération d’étudiant-e-s romantiques et mal dans leur peau. Et d’un point de vue plus personnel, ces chansons (enfin, les plus marquantes) ont su comme caresser en moi les cicatrices laissées par le passage à l’âge adulte, cette période trouble et troublée où tout paraît tour à tour possible et impossible. Caresser, j’insiste, car la musique des Sundays n’est pas de celles qui remuent le couteau dans les plaies ou les grattent jusqu’au sang. Elle s’écoule plutôt comme une fine pluie d’automne rafraîchissante et piquante à la fois.
It’s perfectly fine to sleep in a chair / From Monday ’til Saturday / And what is so wrong with talking out loud / When I’m all alone
You’re not the only one I know
Musicalement parlant, le groupe trempe les guitares mélodieuses des Smiths dans la brume vaporeuse des Cocteau Twins, le chant d’Harriet Wheeler étant néanmoins plus incarné que celui de Liz Fraser, moins intimidant aussi. Dans leurs meilleurs moments, les Sundays parviennent à créer une proximité troublante avec leurs auditeurs, suspendus aux lèvres délicates d’Harriet comme aux guitares qui ne le sont pas moins de David. On écoute ainsi transi le merveilleux Here’s where the story ends ou le gracile et joliment tourmenté You’re not the only one I know. Le chant d’Harriet Wheeler fait quand même beaucoup pour le charme de ces morceaux, mêlant dans une même inflexion détermination et vulnérabilité, la jeune femme paraissant parfois refouler ses larmes pour ne surtout pas paraître baisser la tête. Ce souffle fragile se retrouve ainsi sur Can’t be sure ou I won tandis que le pétulant Hideous towns carillonne de tous ses arpèges et dégage une drôle de fièvre intranquille, dont on ne sait trop si elle traduit joie ou mal-être (sans doute les deux). Toutes mes préventions ne se sont cependant pas envolées avec l’âge et l’évanescence de certaines chansons tire parfois vers l’inconsistance. Des chansons comme A certain someone ou I kicked a boy ne sont pas désagréables mais manquent de flamme ou d’un je-ne-sais-quoi qui les rendrait vraiment remarquables. Et quand l’influence des Cocteau Twins (auxquels je n’ai jamais compris grand chose) prend le dessus, le résultat est poliment ennuyeux. On prendra quand même la peine de passer outre ces quelques scories pour saluer cet album à la séduction un peu désuète, qui porte en lui quelque chose qu’on souhaite à tout prix continuer de porter en nous : la jeunesse.
It’s that little souvenir of a terrible year / Which makes my eyes feel sore / Oh I never should have said the books that you read / Were all I loved you for
Here’s where the story ends
J’avoue ne rien avoir écouté d’autre de la discographie des Sundays. Le groupe souffrit en 1991 de la faillite de son label mais fit paraître quand même un deuxième album, Blind en 1992 avant un troisième (et pour l’heure dernier) opus en 1997, Static and silence.
1 réponse
[…] The Sundays Hideous towns [1990, Reading, writing and arithmetic] […]