Grandeur d’âme
Daniel Darc La taille de mon âme (2011, Jive/Sony)
Avec son éblouissant Crèvecoeur de 2004, Daniel Darc avait réussi une forme de coup parfait, combinant réussite artistique totale avec une reconnaissance publique qu’il n’avait plus connu depuis Taxi Girl. Après tant d’années à manger son pain noir, un tel dénouement s’apparentait à une résurrection et donnait l’envie (pas si fréquente) de se réjouir des rebonds de la fortune. Daniel Darc n’entendait néanmoins pas faire de Crèvecoeur son testament, aussi magnifique fut-il, et le succès de celui-ci allait lui remettre le pied à l’étrier. Aidé de son brillant alter ego, Frédéric Lo, Daniel Darc revint donc en 2008 avec un nouvel album, Amours suprêmes, lequel, malgré de bons moments, ne pouvait naviguer dans les hautes sphères de son grandiose prédécesseur.
J’ai déchiré /A grands coups d’dent / Le fil d’acier /M’emprisonnant
C’est moi le printemps
Après ce disque mi-figue, mi-raisin, on ne s’attendait donc pas à retrouver un Daniel Darc en aussi grande forme artistique avec La taille de mon âme, d’autant que la collaboration si fructueuse avec Frédéric Lo était désormais terminée. C’est pourtant bien un nouveau chef-d’œuvre que nous offre ici l’ex-leader de Taxi Girl. Là où Crèvecoeur se jouait en clair-obscur et dans une forme d’ascèse musicale (malgré son insondable richesse), La taille de mon âme use d’éclairages multiples, au gré des humeurs et des envies d’un Darc plus vivant que jamais.
Moi je suis un ange déchu / Un prince en exil / Supportez-moi / C’est moi le bûcher des vanités
C’était mieux avant
Au fil du disque, Darc sillonne différents territoires, livrant là une saillie rock roborative (My baby left me), ici une ballade jouée à la bougie, une fesse posée sur le tabouret du piano (Vers l’infini), ailleurs une valse stupéfiante de beauté (La taille de mon âme) ou une chevauchée évoquant un inédit des Tindersticks (Quelqu’un qui n’a pas besoin de moi). L’album est entrecoupé d’extraits de films, de “variations” chantées-parlées, et qui ramènent à notre mémoire les formidables collages d’un grand disparu des radars, le merveilleux Jean Bart qu’on a tant aimé et dont on parlera certainement un de ces jours. Et si le disque irradie une certaine gravité, Darc n’hésite jamais à faire preuve d’humour et de dérision, comme sur l’impressionnant C’était mieux avant, le sublime C’est moi le printemps ou le badin Les femmes aiment les tatouages. L’album se clôt sur un Sois sanctifié ramenant à la surface la religiosité qui nimbait Crèvecoeur et nous laisse au final encore une fois ébahi devant tant de grandeur. Une grande âme assurément, une des plus grandes de la chanson d’ici.
Crever, c’est comme baiser / C’est pas parce qu’on en a envie qu’il faut le faire tout de suite
My baby left me
4 réponses
[…] souvent un peu oublié dans l’ombre portée de son chef-d’œuvre Crèvecoeur paru en 2004, La taille de mon âme démontre, s’il en était besoin, à quel point Daniel Darc avait atteint une forme de […]
[…] d’honnête facture mais néanmoins bien loin des cimes de Crèvecoeur. En 2011 est sorti La taille de mon âme que je n’ai pas encore eu l’heur […]
[…] un geste d’une suprême élégance. Ultime chef-d’œuvre publié de son vivant, son album La taille de mon âme révèle à chaque écoute l’éclat de sa magnificence. Sur ce disque tendu de nuit, « Vers […]
[…] souvent un peu oublié dans l’ombre portée de son chef-d’œuvre Crèvecoeur paru en 2004, La taille de mon âme démontre, s’il en était besoin, à quel point Daniel Darc avait atteint une forme de plénitude […]