Double jeu
Devendra Banhart Rejoicing in the hands et Niño rojo (2004, Young God Records)
Au sortir d’une jeunesse passée entre Caracas et Los Angeles et déjà occupée de dessin et de musique, Devendra Banhart suit quelque temps les cours du San Francisco Art Institute où il se frotte à diverses formes d’expression artistique. Sa “fibre hippie” ou sa soif de découvertes le poussent rapidement à laisser là ses études et à s’embarquer pour une itinérance musicale qui le conduira des pubs de San Francisco aux rues de Paris pour finalement le ramener à la Californie. A son retour, le producteur Michael Gira tombe sur quelques démos enregistrées par le bonhomme et décide de sortir ces maquettes pourtant brinquebalantes sur son label Young God. Oh me oh my… (que je ne connais pas) paraît en 2002 et recueille déjà des critiques louangeuses. Après la parution d’un nouvel EP, The black babies, courant 2003, Banhart et Gira se retrouvent une dizaine de jours dans un studio sans prétention pour coucher sur bande pas moins de 57 morceaux. 32 sont finalement retenus pour figurer sur deux albums jumeaux, de 16 titres chacun, qui paraissent à quelques mois d’intervalle au cours de l’année 2004 : Rejoicing in the hands et Niño rojo.
Ces deux albums étant issus des mêmes sessions, il m’apparaissait évident d’en traiter d’un même mouvement tant ils sont construits du même matériau. J’avoue ne pas avoir adhéré inconditionnellement au charme rêveur de ces deux disques pétris de qualités mais, si j’émettrais encore quelques menues réserves, mes récentes réécoutes ont levé chez moi bien des préventions. Quoi qu’il en soit, le surgissement d’un songwriter capable d’aligner en quelques mois une trentaine de chansons de ce calibre est suffisamment remarquable pour mériter l’attention et susciter l’admiration.
De quelques jours de sessions, Devendra Banhart tire donc de quoi alimenter deux disques folk de tout premier plan. Dans ce registre musical si rebattu mais apparemment capable de se régénérer à l’infini et d’inspirer des générations d’artistes brillants, Banhart démontre à son tour une réelle singularité. L’intégralité des morceaux est bâtie autour du couple guitare acoustique/voix, parfois accompagné d’arrangements discrets de cordes ou de claviers. Avec une simplicité désarmante, Banhart réussit à mêler les beautés et les influences du meilleur folk anglais (de Nick Drake dont l’ombre vient planer à différentes reprises à Vashti Bunyan qui vient prêter sa voix sur le titre Rejoicing in the hands), du blues (on pense parfois à la rusticité radicale du Beck de One foot in the grave) et du folk américain teinté de psychédélisme, le tout irrigué par d’autres affluents plus exotiques, notamment quelques réminiscences sud-américaines que Banhart a dû biberonner dans sa jeunesse. A ce vocabulaire musical, Devendra Banhart ajoute une sorte d’innocence rêveuse, un étonnant mélange de douceur et de fantaisie qui créent autour de ces chansons une atmosphère d’une grande originalité.
Si tous les titres ne sont pas de totales réussites et si parfois la voix chevrotante de Banhart peut se révéler quelque peu crispante, il n’en reste pas moins que ces deux disques renferment suffisamment de beautés pour ne pas aimer s’exposer à leurs lumières. Difficile de distinguer fondamentalement les deux albums, mais j’avoue quand même une petite préférence pour Niño rojo et ses teintes printanières, Rejoicing in the hands affichant un charme plus trouble mais pêchant parfois par quelques longueurs.
La parution de ces deux disques propulsa Devendra Banhart chef de file d’un (énième) renouveau folk dans lequel s’engouffrèrent de nombreux artistes plus ou moins doués, une partie d’entre eux frayant dans l’entourage de Banhart lui-même, de Cocorosie à Vetiver. Notre homme eut heureusement l’intelligence de ne pas se laisser enfermer dans ce rôle de nouveau pape hippie-folk, délivrant en 2005 un Cripple crow ouvert à d’autres horizons. Devendra Banhart a depuis sorti deux autres albums que j’avoue ne pas avoir écoutés : Smokey rolls down thunder canyon en 2007 et What will we be en 2009.
Bonjour,
Je publie ce message ici faute de contact où l’envoyer.
La Médiathèque André Malraux vient d’ouvrir son site musical à destination de la musique locale en Languedoc Roussillon (http://mammusique.wordpress.com). Nous faisons ainsi de la médiation pour les artistes locaux qui peinent à se faire entendre du grand public.
Afin d’augmenter notre visibilité sur les moteurs de recherche, nous vous invitons à publier un lien vers notre site. Nous ferons bien sûr de même pour votre propre site web.
Cordialement,
Tristan Morlaes.
PS: belle découverte musicale que Devendra Banhart, by the way…