L’étoile mystérieuse
Mazzy Star She hangs brightly (1990, Capitol Records)
David Roback rencontre Hope Sandoval vers le milieu des années 1980. Il est déjà une figure reconnue de l’underground rock américain, ayant joué les fers de lance du mouvement Paisley Underground au sein de son premier groupe, The Rain Parade. Cette scène basée à Los Angeles visait à remettre au goût du jour le rock américain de la fin des années 1960, du psychédélisme West Coast (Love, The Doors…) au folk-rock en passant par le rock vénéneux du Velvet Underground. Quand Roback rencontre Sandoval, il officie au sein d’Opal avec la chanteuse Kendra Smith ; elle chante de son côté dans un petit groupe folk du nom de Going Home qu’il s’empresse de produire. Le jour où Kendra Smith plaque tout son monde au beau milieu d’une tournée d’Opal, Roback appelle à la rescousse la belle Sandoval. L’alchimie fonctionne si bien que le duo abandonne la carcasse d’Opal pour fonder un nouveau groupe autour de lui, ce sera Mazzy Star.
Avec Mazzy Star, Roback va trouver le véhicule idéal pour donner corps à son rêve musical. A la fois muse et premier rôle, Hope Sandoval complète parfaitement le travail de Roback et le duo va briller d’une fascinante aura durant toute la première moitié des années 1990. She hangs brightly constitue le premier jalon d’une série de trois albums qu’on pourra considérer aujourd’hui comme autant d’épisodes d’une palpitante aventure immobile.
Dès ce premier opus, Mazzy Star transforme une pelletée d’influences évidentes en quelque chose d’unique. Si le groupe puise sans vergogne dans les eaux qui abreuvaient déjà le courant Paisley Underground – folk, rock psychédélique, Velvet Underground -, il en tire des richesses nouvelles. Au final, Mazzy Star semble diffracter la lumière de toutes ses sources d’inspiration pour dispenser un halo d’un éclat sans pareil. Les guitares et la production (ah cette reverb) de Roback bâtissent un écrin splendide sublimant le chant envoûtant de Sandoval, chant de sirène qui désoriente et subjugue l’auditeur. La musique de Mazzy Star dégage une sorte de lascivité froide, qui impose son tempo d’une lenteur impériale et enivre les sens en les engourdissant.
Plus prosaïquement, la musique de Mazzy Star alterne entre ballades folk-rock (Halah, Before I sleep ou le somptueux Give you my lovin) et dérives embrumées, emplies de psychédélisme opiacé et duquel sourd une indicible menace. Sur Ghost highway par exemple, la guitare de Roback vient lacérer une ligne de piano sépulcrale, tandis que le chant de Sandoval semble s’élever au-dessus du brasier comme celui d’une prêtresse païenne. Mazzy Star délivre aussi une reprise exceptionnelle d’un titre des obscurs Slapp Happy, Blue flower, sur lequel vient planer le fantôme du Velvet Underground intouchable de I’ll be your mirror. On n’oubliera pas de mentionner aussi le tellurique Taste of blood, sur lequel Sandoval allume les cendres des Doors avant que Roback ne déchaîne le brasier.
She hangs brightly pèche néanmoins par quelques morceaux plus faibles, moins remarquables comme Ride it on ou « I’m sailin« . Le groupe gommera ces quelques défauts sur son album suivant, le majestueux So tonight that I might see. On en reparlera bientôt…
2 réponses
[…] jours à peine après avoir parlé dans ces colonnes du premier album de Mazzy Star – She hangs brightly – , il serait tentant de reprendre peu ou prou les mêmes mots pour évoquer […]
[…] creux de leur déjà très bon premier opus, Mazzy Star plaçait cette petite bluette country. Loin d’être leur meilleur titre, le […]