Ce rêve bleu
Grandaddy Sumday (2003, V2)
Après quelques jours très agréablement passés ailleurs, il est temps de revenir (avec plaisir) à nos moutons musicaux.
A rebours des inconditionnels de Grandaddy qui semblent avoir ressenti une pointe de déception à l’écoute de ce Sumday en regard des (éminents) mérites de son prédécesseur, j’éprouve une affection sans bornes pour ce grand album bleu, profond comme une âme en peine.
Nos barbus de Modesto continuent d’user peu ou prou des mêmes armes qu’avant pour se tailler une place de choix dans nos cœurs d’artichaut : des claviers futuristes envoient en apesanteur des guitares indie-rock, des mélodies stratosphériques célèbrent la mise sur orbite de Neil Young tandis que la voix d’enfant triste de Jason Lytle froisse la boule que ses textes dépressifs nous ont mise au creux du ventre.
Par rapport à The sophtware slump, Grandaddy tend néanmoins à resserrer quelque peu son propos, délaissant les plages atmosphériques qui faisaient planer sa musique et nous avec pour renouer avec un certain « classicisme » pop. Cette densité nouvelle n’affecte aucunement la légèreté de ces chansons, qui continuent d’évoluer plusieurs hectomètres au-dessus du sol, solaires et luminescentes dans l’atmosphère, petits ballons flottant dans les hautes sphères.
Une bonne partie des titres se développe sur un mid-tempo un peu bancal, à même de fendre le cœur des plus endurcis. On recommandera particulièrement aux âmes sensibles les merveilleux I’m on standby, Lost on yer merry way et le déchirant OK with my decay et son final ascensionnel. Les textes de Lytle demeurent globalement extrêmement sombres, petites histoires tragiques énumérant le quotidien de nos défaites, comme le déchirant Saddest vacant lot in all the world. Grandaddy aligne aussi quelques titres pop plus punchy comme le génial Now it’s on introductif (qui touche en moi nombre de cordes sensibles intimes) ou le sombre et lumineux El Caminos in the West (« Here comes the chaos / Perfectly on time again / Is it ever gonna end / I feel so far away from home »). Le résultat s’avère en tous cas grandiose, rêve éveillé mis en musique par un groupe un peu ailleurs.
Grandaddy fera paraître un dernier album en 2006, Just like the fambly cat avant de splitter. Jason Lytle a lui sorti un disque solo en 2009, Yours truly, the commuter sur lequel il faudra bien que je me penche un de ces jours.
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[…] 2003, Grandaddy allait à mon sens progresser encore d’un niveau avec l’exceptionnel Sumday. S’ensuivra un dernier album, Just like the fambly cat, que je ne connais pas, mais qui […]