Soleil d’hiver
Allah-Las S/T (2012, Innovative Leisure)
Par ces températures glaciales, on peut toujours compter sur la musique pour nous procurer notre dose quotidienne de soleil. Le premier album de ces Californiens pur jus agit ainsi sur moi depuis une petite quinzaine comme une source bienfaisante de lumière et de chaleur, en provenance directe des plages de Los Angeles.
Out on the water’s where you’re gonna find me / All alone with my mind, headed for a bounty
Catamaran
Le quatuor se cristallise sous forme de groupe en 2008, autour de trois compères travaillant ensemble dans un célèbre magasin de disques de Los Angeles. On imaginera volontiers que les membres du groupe ont alors largement profité de leur situation pour se constituer une solide culture musicale, allant notamment explorer en profondeur les bacs dédiés au rock 60’s, du garage à la surf-music en passant par le rock psychédélique. Allah-Las fait en effet partie de ces musiciens suffisamment doués pour regarder fermement vers le passé sans pour autant paraître rétrogrades. Il y a du La’s ou du Coral (toutes proportions gardées bien entendu) chez les Allah-Las, dans cette façon de jouer une musique d’hier avec une absolue fraîcheur, démontrant par la même qu’une musique ne semble datée que parce que ceux qui s’en emparent ont les doigts et l’inspiration décrépits. Le groupe aligne donc une dizaine de chansons aux mélodies lumineuses, qui souvent tournicotent sur elles-mêmes et produisent par leurs voltes un rafraîchissant courant d’air. La fluidité de l’ensemble est encore rehaussée par la production impeccable, vintage et racée, de Nick Waterhouse tandis que la coolitude du chant de Miles Michaud contribue pour beaucoup à l’atmosphère décontractée qui enveloppe le disque tel un halo de lumière brumeuse.
If you thought that you tied me down / Well girl it’s high time that you found / Only thing left for you to see / You’ll never find another man like me
Don’t you forget it
L’album s’ouvre sur un Catamaran rutilant, qui croise toutes voiles dehors, le pont baigné d’un chaud soleil de juin. Tout au long du disque, les Allah-Las mêlent la limpidité des mélodies West Coast à la rugosité du garage-rock, le tout mâtiné d’une touche stonienne qui ressort au détour de certaines inflexions de la voix de Michaud comme sur le pétulant Tell me (what’s on your mind). Au fil des morceaux qui défilent, le groupe organise quelques croisements intéressants, comme sur ce No voodoo qu’on imagine comme un titre de Foxygen accompagné par Real Estate. Sur Sandy, c’est l’ombre des fantastiques liverpudliens de The Coral qui vient planer, eux aussi ayant largement déniché leur inspiration miraculeuse sur les côtes de l’Ouest américain. Allah-Las place aussi sur son album deux instrumentaux à la cool, Sacred sands et Ela Navega qui mêlent surf et country et ont pour grand mérite de chasser les nuages. Impossible enfin de passer sous silence la beauté simple et radieuse de la ballade Vis-à-vis ni de résister à ce Long journey terminal qui tournoie comme pour mieux s’enfoncer dans nos cerveaux, merveille de ressassement drogué qui toupille et toupille pour nous procurer un bien plaisant vertige.
I’m heading down by the river / To kill your daddy tonight / And by the break of day / You know that we’ll be outta sight
Long journey
A l’instar du Best Coast de Beth Cosentino mais dans un tout autre genre, Allah-Las nous adresse avec cet album un réjouissant condensé de Californie, un disque de soleil et de sable sans doute façonné à l’ombre d’un garage et de clubs enfumés. Le groupe a remis ça l’an dernier avec Worship the sun, sur lequel je vais bien entendu m’empresser de me pencher très vite. Je vous tiendrai au courant…
2 réponses
[…] Allah-Las Don’t you forget it [2012, sur l’album Allah-Las] […]
[…] premier album des Allah-Las – et une bonne partie de leur discographie ultérieure – demeure un excellent moyen […]