High energy
The Rakes Capture / release (2005, V2)
Vous connaissez l’histoire par cœur : une fois que les White Stripes puis les Strokes eurent brillamment et bruyamment remis les guitares sur la table du rock de ce début de siècle, les vannes s’ouvrirent pour une déferlante de groupes à guitares dont beaucoup allèrent nourrir leurs influences du côté du punk et du post-punk, qu’ils soient anglais ou américains. Parmi la cohorte innombrable de ces combos surgis entre 2000 et 2005, The Rakes reste un de ceux dont le nom et la musique méritent de n’être pas oubliés.
I don’t wanna miss out on anything / At the same time I feel the need to retreat / Everything is temporary these days / Might as well go out for the fifth night in a row
Retreat
Composé du chanteur et guitariste Alan Donohoe, du bassiste Jamie Hornsmith, du guitariste Matthew Swinnerton et du batteur Lasse Petersen, le groupe fait paraître coup sur coup deux singles imparables, Strasbourg puis 22 grand job, qui ne manquent pas d’attirer l’attention. Le quatuor se rôde en tournant en compagnie d’artistes croisant dans les mêmes eaux musicales, d’Art Brut à Bloc Party avant de publier ce premier album en 2005. Ce disque se place à l’évidence dans la lignée des groupes à guitares anglais qui se révèlent à l’époque, de Franz Ferdinand à Bloc Party – groupe avec lequel les Rakes partagent d’ailleurs le producteur Paul Epworth. Autant que les références communes (Clash, Buzzcocks, Wire, Gang of Four, etc.), c’est surtout cette volonté de s’adresser autant aux jambes qu’aux nerfs de ses auditeurs qui rapproche les Rakes des groupes précités. Les quatre compères délivrent une musique mêlant l’énergie brute et rentre-dedans du punk à une dynamique invitant sur le dance-floor, d’impeccables guitares tranchantes et abrasives à une rythmique à la fois souple et syncopée. L’album se révèle par ailleurs extrêmement cohérent et ne se contente pas – comme certains de leurs petits camarades (Kaiser Chiefs ?) – de masquer une inspiration déficiente derrière un ou deux morceaux réussis.
Over and over she burns my circuits / I feel fire rushing through my wires / I can feel all the things that we can’t share
Binary love
Les Rakes frappent vite et fort, exécutant les 11 morceaux de Capture/release en 35 minutes. L’auditeur est sans détour happé par une déferlante d’énergie cinglante avec un épatant triptyque : Strasbourg est une bombe soufflante qui rappelle la verdeur des Buzzcocks avec une improbable histoire sur fond de guerre froide entre les deux Allemagne : Retreat évoque le meilleur Bloc Party rehaussé d’une pointe de détachement subtil tandis que 22 grand job nous promène au fil de son riff démoniaque. Le groupe affiche sur ce morceau tous ses atouts : une capacité à trousser des lignes mélodiques mémorables et ce regard ironique sur l’homme urbain contemporain, avec son travail qui remplit les vies autant qu’il ne les vide. L’album ne parvient pas forcément à conserver un tel niveau tout du long mais n’en demeure pas moins d’une grande consistance. On retiendra ainsi l’excellent Open book, ses saccades et son refrain à base de « oh oh » qui feront le bonheur d’un spot publicitaire. Sur Binary love, le groupe exhibe une facette plus mélancolique et évoque le post-punk brumeux des Psychedelic Furs. Violent remet la tête de l’auditeur dans la machine à laver tandis que Terror use d’une dynamique martiale et obsessive pour aborder la psychose terroriste alors à son sommet – thème que l’on retrouvera d’ailleurs sur le deuxième album du groupe. L’album se termine sur une note moins enfiévrée avec l’impeccable Work work work (pub club sleep), bel hymne pop-punk trempé de pub-rock.
It’s all these words, ideas or different arguments / Someone’s always talking when I try to make some sense / From all this stress that is constantly going on / I just drift along with no focus or meaning
Work work work (pub club sleep)
Le groupe fera paraître un deuxième opus à peine deux ans plus tard, un Ten new messages étonnamment dépressif, qui viendra montrer que l’ironie et le détachement de ce premier album masquaient à peine certains côtés plus noirs et plus fragiles.
1 réponse
[…] dans ces pages la grande estime que je portais au premier album de ce quatuor britannique, ce Capture/release paru en 2005. C’est donc avec une réelle curiosité que j’attendais le deuxième opus […]