L’hédoniste
Étienne Daho Paris ailleurs (1991, Virgin)
Entre vacances, Jeux Olympiques et pouponnage, il devient difficile de trouver un peu de temps pour alimenter ces pages. Cependant, et avant de m’accorder quelques jours de pause blogueuse bien mérités (de mon point de vue en tous cas), je tenais à évoquer ici ce Paris ailleurs dont les couleurs chaudes aideront à rehausser celles un brin terne de la météo estivale
Dans l’échelle de mes admirations, j’avoue que je ne saurai revendiquer la qualité de fan du sieur Daho, plus justement celle de sympathisant. Ma connaissance de la discographie du Rennais demeure extrêmement parcellaire et sans ligne directrice, ce qui ne m’empêche pas d’apprécier aussi bien l’électro-pop romantique de Pop satori (1986) que les orchestrations somptueuses du superbe Corps et armes (2000).
Paris ailleurs est souvent présenté comme l’album de la maturité d’Étienne Daho, chose que je serai bien en peine de confirmer. Il est en tous cas celui du triomphe public total, Daho se permettant d’aligner cinq tubes en or massif et d’accrocher des chiffres de vente imposants. Avec cet album, Daho relève surtout la gageure de produire une pop française exigeante et grand public, apportant un bienvenu contrepoint aux têtes de gondole faisandées alors triomphantes de la variété d’ici. Loin des teintes synthétiques de ses premiers tubes du mitan des années 1980, Daho s’en va raccorder son inspiration à l’énergie new-yorkaise le temps de l’enregistrement de l’album et en revient avec onze chansons naviguant entre pop, soul et chanson française. Accompagné de l’impeccable Édith Fambuena (aux guitares comme à la production) des Valentins, Étienne Daho livre un album hédoniste et direct, revendiquant ses appétences sans masquer pour autant ses fêlures et ses doutes, un disque à la fois affirmé et plein d’humilité.
Paris ailleurs est d’abord l’histoire d’un premier quart d’heure de feu, l’album s’ouvrant par une quinte rutilante de tubes plus réussis les uns que les autres. Entre l’entraînant Des attractions désastre initial et l’émouvant Un homme à la mer, l’auditeur aura pu apprécier les arômes soul donnés au formidable Saudade (conduit de main de maître par une ligne de piano entêtante à souhait), au roboratif Comme un igloo (et ses cuivres et chœurs brûlants comme la glace) ou au sublime Les voyages immobiles qui se pare de teintes gospel le conduisant droit à l’élévation. La deuxième moitié du disque m’apparaît un brin en-deçà de ce début pétaradant mais entre un Rue des petits hôtels noyé de bleu et une reprise tout sourire de La berlue de Françoise Hardy, il reste suffisamment de bons moments pour ne pas bouder son plaisir.
Au final, c’est bien ce mot plaisir qui reste finalement en tête après l’écoute de cet album, ce plaisir communicatif qui se diffuse de Daho à l’auditeur et qui aura su embarquer une cohorte d’adeptes derrière sa bannière colorée. “De la vie faire ripaille” qu’il vous dit, alors justement : au plaisir…et bonnes vacances !