Le charme des serpents
Lloyd Cole & the Commotions Rattlesnakes (1984, Polydor)
Né en 1961 dans la petite ville thermale de Buxton, Angleterre, Lloyd Cole étudie la philosophie à l’université de Glasgow quand il rencontre les membres des futurs Commotions. Le groupe se stabilise sous la forme d’un quintet et la qualité de ses compositions lui vaut de décrocher rapidement un contrat avec Polydor qui fait paraître en 1984 ce remarquable Rattlesnakes.
Avec ce disque formidable, Lloyd Cole (et ses Commotions) livre ce qui reste encore près de 30 ans plus tard un album majeur d’une pop britannique alors en plein renouveau. Après l’incendie punk et la glaciation new wave qui s’ensuivit, une génération de groupes anglais, plus brillants les uns que les autres (Smiths, Prefab Sprout, Pale Fountains et autres Everything but the Girl), déboule alors – malgré tout ce qui les sépare – les mélodies en bandoulière et le romantisme porté haut pour faire souffler un vent de fraîcheur sur la scène pop-rock. Et Rattlesnakes mérite indubitablement sa place au tableau d’honneur de l’époque…
Difficile de dire ce qui charme le plus dans ces dix chansons qui résonnent presque toutes comme des classiques. On pourra citer pêle-mêle : la pureté des arpèges de la guitare de Neil Clark (ah, l’incipit à tomber du merveilleux Are you ready to be heartbroken ?) ; le romantisme lettré des textes de Lloyd Cole, emplis de références et de name-dropping (on croisera Simone de Beauvoir, Eva Marie Saint ou Greta Garbo) mais balancés avec suffisamment de détachement et d’élégance pour éviter de paraître pompeux ; la grâce cristalline de 2CV ou bien encore la sensualité féline de Forest fire. Il faudrait également célébrer cet étonnante alliance entre ces mélodies lignes claires et ce drôle de halo atmosphérique qui semble entourer la plupart de ces chansons, ce romantisme à la fois tremblé et bravache qui exsude de vibrantes vapeurs, quelque chose comme une fièvre peut-être…
Pour résumer, on dira donc que Rattlesnakes est un disque brillant rempli de grandes chansons, dans lequel se mélangent les influences impeccables de Lou Reed (l’introductif Perfect skin ou l’inusable Are you ready to be heartbroken ?), de Bob Dylan (sur le logorrhéique et échevelé Rattlesnakes) ou des Byrds, parmi d’autres… Et le grain de sel soul de l’imparable Forest fire ne vient que rehausser le résultat d’ensemble. On conseillera enfin d’écouter de préférence la version “extended” de l’album, avec quatre titres bonus de haut niveau, les formidables Sweetness et Andy’s babies en tête.
La suite de la carrière de Lloyd Cole s’avérera mouvementée, et rarement à la hauteur artistique de cet épatant premier opus. Après deux autres albums, Lloyd Cole mettra fin aux Commotions en 1987 avant de débuter une carrière en solo. Il connaîtra quelques succès d’estime au début des années 1990 (No blue skies ou She’s a girl and I’m a man) mais signera surtout un autre petit bijou en 1995 avec le magnifique Love story. Le très doux Music in a foreign language de 2003 vaut également l’écoute. Lloyd Cole continue de sortir des disques, de faire des concerts, dans un anonymat relatif en ce début de siècle.
3 réponses
[…] jeux innocents », qui sonne presque comme un inédit de Lloyd Cole période Rattlesnakes (toutes proportions […]
[…] n’est pas le meilleur disque du bonhomme et qu’il ne peut soutenir la comparaison avec son fantastique prédécesseur, il contient quand même son lot de bonnes chansons et surtout ce magnifique James, qui déploie […]
[…] Cole et ses Commotions de donner suite à la grâce fiévreuse et à l’éclat mélodique de Rattlesnakes, premier album délivré comme un miracle en 1984. L’épreuve du deuxième album […]