Noir is beautiful
Jim Noir Tower of love (2006, My Dad)
C’est âgé d’à peine 21 ans que ce jeune Anglais originaire de Manchester décroche en 2003 son premier contrat discographique avec le label My Dad, chez lequel il déboule la besace déjà remplie de dizaines de chansons. Après quelques EP, Tower of love, son premier album, paraît en 2006, et se retrouve bientôt boosté par l’utilisation du morceau Eanie meany pour la bande-son d’une campagne publicitaire Adidas diffusée en boucle en cette année de Coupe du Monde de football.
Si ce premier opus compile en fait les singles sortis par Jim Noir depuis ses débuts, le résultat n’en demeure pas moins parfaitement cohérent. Avec monsieur Noir, on découvre un de ces songwriters maniaques furieusement autarciques – les crédits du disque précisent ainsi “Everything by Jim Noir” – qui semble s’être créé son propre monde en technicolor, toutes fenêtres ouvertes sur une imagination débordante. Jim Noir bâtit son univers sous haut patronage pop, cette pop excentrique et lumineuse, psychédélique et ensoleillée, qu’on retrouve aussi bien chez Mc Cartney et XTC que chez les Beach Boys. Mais, si notre jeune Anglais puise largement dans des références pop classiques et classieuses, il n’en oublie pas moins de les agrémenter à sa sauce, ajoutant de subtiles touches électro à ses arrangements de flûte, ses arpèges de guitares et ces chœurs féériques omniprésents tout au long de l’album – Jim Noir aimant (un peu comme Elliott Smith mais à de moindres altitudes) à démultiplier sa voix pour à la fois alléger et enrichir sa musique et la peupler à peu de frais.
L’album s’ouvre sur le remarquable My patch, une de ces ritournelles entêtantes qui s’accrochent à vos tympans et vous collent inévitablement le sourire aux lèvres. On imagine volontiers Jim Noir emmener derrière lui une troupe d’ours musiciens débonnaires se dandinant au rythme de ce morceau impeccable. Le reste de l’album est une collection de petits bonheurs. Computer song évoque ainsi le meilleur de Badly Drawn Boy et Jim Noir s’y dépeint aux prises avec le comportement erratique de son ordinateur : “Everytime I try to make a silly little song / My efforts are all wasted cause machinery goes wrong”. Difficile aussi de passer à côté du tube Eanie meany avec son accroche irrésistible qui révèle le côté enfantin dont je parlais plus haut : “If you don’t get my football back / I’m gonna get my dad on you”. On s’arrêtera un instant devant la valse aux étoiles de Tower of love et surtout sur le sublime Key of C qui semble charrier dans son sillage une nuée de papillons multicolores. Turbulent weather paraît quant à lui droit sorti du Loaded du Velvet Underground tout comme le superbe et conclusif The only way.
Au final, Jim Noir livre ici un disque roboratif qui gagne à être découvert. Cette musique est si fine et si légère qu’on risque à tout moment de passer à côté et de rater son charme rafraîchissant qui apporte une vraie dose d’optimisme dans vos oreilles : pas un chef-d’œuvre bouleversant non, mais un ensemble de chansons plaisantes et agréables, c’est déjà notable. J’avoue ne pas trop savoir ce qu’est devenu le Mancunien. Un second album éponyme est paru en 2008 et depuis, je n’ai pas trouvé trace de nouvelle sortie sous cette forme. Le site du bonhomme fait état de différents EP dont un qui semble paru très récemment. A creuser donc…