Parachute doré
Coldplay Parachutes (2000, EMI)
Groupe multi-platiné, dont chaque sortie d’album atteint des scores de vente à faire baver d’envie tous les executive de toutes les majors de la planète, emmené par un gentil garçon bien élevé marié à une célèbre actrice hollywoodienne, Coldplay s’est attiré du même coup – en partie pour toutes ces raisons – des tombereaux de haine et de mépris. Trop lisse, trop poli, trop gnian-gnian, trop bourgeois… que n’a-t-on pas entendu se déverser sur la tête de Chris Martin et de ses acolytes, qui se virent même comparés à l’épouvantable James Blunt. Pour un groupe présenté à ses débuts comme un disciple de Radiohead, la disgrâce était spectaculaire… Et pourtant moi, j’aime bien Coldplay. Humble et modeste malgré son succès colossal, parvenant à séduire les foules avec une pop élégante sans être putassière (même si, parfois…), Coldplay mérite plus de respect qu’il n’en suscite habituellement chez les intégristes du bon goût rock. Et on ne leur saura jamais assez gré de n’être pas devenus Muse…
Les origines de Coldplay sont des plus banales, un argument de plus pour ses contempteurs moquant sa grise normalité et son manque de glamour. Chris Martin, Jon Buckland, Guy Berryman et Will Champion sont quatre copains de fac (à Londres) quand ils décident de marier des influences assez variées (Tom Waits, Jimi Hendrix…) pour former un groupe. Coldplay donne des concerts, enregistre un EP puis deux, et décroche un contrat chez Parlophone. La mode est au rock romantique et lyrique, et les maisons de disque cherchent toutes le nouveau Radiohead, le seul et unique ayant déjà largué les amarres… Avec ses mélodies en béton et ses guitares vibrantes juste ce qu’il faut, Coldplay décroche la timbale, accrochant à ce Parachutes doré une bordée de tubes lui ouvrant grandes les portes des stades : Yellow, Trouble, Don’t panic.
Que trouve-t-on alors sur ce Parachutes? Rien de révolutionnaire certes, et Coldplay fera bien mieux à mon sens par la suite (sur A rush of blood to the head notamment), mais de quoi satisfaire nos oreilles le temps de quelques chansons joliment troussées. Coldplay réussit à rendre le lyrisme modeste, l’humilité héroïque. Le groupe alterne des plages mélancoliques nimbées d’une brume assez troublante (Don’t panic ou l’émouvant balancement de Sparks) avec quelques poussées de fièvre communicatives (Shiver ou le tube Yellow). Alors bien sûr, Coldplay est inconstant et quelques morceaux plan-plan ne susciteront qu’une indifférence polie (We never change, High speed). Il est clair aussi que le groupe souffre de la comparaison avec Radiohead, ne faisant qu’évoquer falaises et cimes abruptes quand son aîné d’Oxford y virevolte sans filet. En même temps, qui évolue à ce niveau ? Les ambitions de Martin et sa bande sont plus modestes mais n’en demeurent pas moins respectables, d’autant que le groupe a l’intelligence de ne pas chercher à “péter plus haut que son derrière”. Pas de quoi crier au scandale ou à l’imposture, et l’on préfèrera plutôt se laisser flotter dans les nuées scintillantes du très beau Spies.
Coldplay continue depuis une carrière assez énorme, le groupe frayant maintenant dans les mêmes sphères commerciales que des mastodontes comme U2. Sa vigueur artistique n’en a semble-t-il pas été trop altérée. Après Parachutes, Coldplay se fendra de ce qui est peut-être son meilleur disque, le remarquable A rush of blood to the head (2002) puis enchaînera avec son disque le moins abouti, le boursouflé X&Y (2005) qui nous fit craindre pour l’avenir musical du combo. La réussite artistique du très bon Viva la vida or death and all his friends de 2008 nous aura rassuré. On reviendra certainement sur tout cela un de ces jours…
2 réponses
[…] j’écrivais dans ces pages il y a déjà 7 ans à propos du premier album de Coldplay, je m’étais laissé aller à une confession sans doute déjà alors proche de […]
[…] morceaux, BRMC en donnant plus d’ampleur à sa musique, en finit par rappeler le Coldplay de Parachutes : c’est un peu ennuyeux sur « Howl », beaucoup plus prenant sur « Weight of the world ». […]