Retour de flamme
Tindersticks The hungry saw (2008, Beggars Banquet)
Je croyais le dossier Tindersticks définitivement enterré, le groupe s’étant enfoncé dans un profond silence après un dernier opus de fort belle facture, son Waiting for the moon de 2003. Restaient trois disques magistraux parus entre 1993 et 1997, avec leurs somptueuses envolées lyriques, leurs chansons belles comme des soirs d’orage, leurs valses enfumées, leurs cordes enivrantes. Je ne m’attendais pas vraiment à ce que le groupe nous joue la scène du grand retour.
Malgré le départ de Dickon Hinchcliffe, architecte des fabuleux arrangements de cordes du combo, le groupe réussit un retour extrêmement convaincant, se glissant sans effort dans ses anciens costumes, toujours aussi classieux. Le fan retrouve ainsi ce goût pour les arrangements riches et subtils, et surtout, le timbre si particulier de Stuart Staples, cette voix de dandy titubant tenant pourtant fermement le gouvernail de ces chansons à grand voile.
Visiblement régénérés par cette absence de cinq ans, les Tindersticks font corps et font même évoluer leur répertoire vers un registre moins sombre, leur ciel d’encre cédant la place en plusieurs occasions à de belles éclaircies. Sur l’excellent Yesterdays tomorrows, le groupe assouvit ses fantasmes soul de vieille date, faisant souffler un vent roboratif dans son intérieur de bois et de velours. Avec The flicker of a little girl, Staples prendrait même presque quelques accents primesautiers. Mention aussi au fascinant The hungry saw, mêlant paroles morbides et air entraînant, et qui constitue sans doute un des morceaux les plus addictifs qu’ait composé le groupe. Les Tindersticks conservent cependant la main dans leur registre de prédilection, ces ballades chavirantes et vibrantes, rivières en crue débordant d’émotions fortes : ainsi, ce Boobar come back to me, qui nous transporte quelque part à Broadway et surtout le sublime The other side of the world, aux violons déchirants comme aux plus belles heures du deuxième album. Le disque se clôt en apothéose avec l’éclatant The turns we took, sorte de feu d’artifice donné dans la cour du château un soir d’été, ramenant l’auditeur vers la sortie avec une classe renversante.
On est prêts à patienter à nouveau cinq ans pour en reprendre une louche.
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[…] l’heure où le groupe fait paraître un nouvel opus – The hungry saw – alors qu’on le croyait disparu, revenons aujourd’hui 15 ans en arrière (Dieu […]