Soul man
Matthew E. White Big inner (2012, Spacebomb / Differ-Ant / Domino)
Il n’y a guère longtemps que j’ai découvert la musique de ce grand gaillard originaire de l’Etat de Virginie mais son enivrant mélange de soul, de gospel, de folk psychédélique et de pop haute couture n’aura pas tardé à produire son petit effet addictif sur mes oreilles conquises. Avec un physique et un look qu’on attendrait plutôt du batteur d’un groupe de heavy-metal, Matthew E. White tient en fait davantage du prêcheur ou du maître de cérémonie. Flanqué d’un big-band volcanique, l’imposant bonhomme joue une musique fréquentant autant les bancs de l’église que les comptoirs des bouges, mêlant l’esprit et le corps, la transcendance et l’immanence, comme le meilleur de la soul et du R’N’B.
You don’t think that you’ll ever die, looking like you do / We all pass away / Everyone finds a way / And I don’t want to live a minute longer than you / So let’s meet the Lord together
One of these days
Le bonhomme cache bien son jeu, derrière ses airs de Droopy et sa voix endormie, mais sa potion est redoutable. L’introductif One of these days constitue une entrée en matière toute en douceur, confortable et ouatée à souhait et on se love déjà avec plaisir dans cette soul soyeuse héritière d’Al Green ou de Solomon Burke. Après nous avoir doucement échauffé, Matthew E. White entreprend de nous cuire à feu vif avec un Big love tellurique, sarabande endiablée et chanson démoniaque qui nous emmène en procession directement de l’office au cabaret, un rhum maison en guise de carburant. Difficile de résister à un morceau pareil, qu’on jurerait entendre fumer (et ce dans tous les sens du terme) et qui vous laissera pantelant et transpirant mais le sourire aux lèvres.
Let’s begin to spiral, let’s begin to spiral / You don’t want to spiral with me
Big love
Matthew E. White remet son costume de grand romantique et enchaîne ensuite deux ballades éclatantes, rutilantes de cordes, de cuivres et de chœurs, mêlant les grandes heures de la soul au songwriting haut de gamme d’une Carole King. Gone away, hommage mortuaire émouvant (il semble bien qu’on y accompagne un corps jusqu’à sa dernière demeure) s’élève par exemple en un gospel lumineux et fervent. On se doute que d’avoir grandi avec des parents missionnaires explique la religiosité qui baigne la musique de Matthew E. White, emplie de références à Dieu ou à la Bible, sans jamais pour autant apparaître pontifiant pour deux sous, en soulman accompli. Cette ardeur invite à la communion, au partage et à la joie. Steady pace remet la locomotive en marche et continue de faire chauffer l’atmosphère, avec un tourbillon de cuivres tourneboulant. Hot toddies débute comme une torch-song et se conclut par une coda psalmodiée teintée de sonorités free-jazz. Matthew E. White garde le meilleur pour la fin, avec ce formidable Brazos dont la soul se transforme progressivement en mantra psychédélique foutraque et incandescent.
Your body’s cold / Your body’s so cold / But your sins and your sorrows are all done away / Why are you living there now, baby? / Why are you living there now?
Gone away
En sueur mais heureux, on réenclenchera le bouton « play » et on ira retrouver l’accueillant entresol entre soul et nuages préparé par ce remarquable bonhomme. On ne manquera pas d’indiquer que le tout nouvel album de Matthew E. White, Fresh blood, vient de paraître (et on vous en donnera des nouvelles à l’occasion).
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[…] de ce grand gaillard barbu de Virginie à l’occasion de son épatant premier album, ce Big inner qui déployait devant nos yeux ébahis une soul-pop psychédélique sensuelle et enfumée, dont les […]