Série noire

Arctic Monkeys Favourite worst nightmare (2007, Domino)

Arctic Monkeys - Favourite worst nightmare

Il n’a pas forcément du être facile pour les Arctic Monkeys de garder la tête froide après le raz-de-marée suscité par leur premier album. Propulsés (comme tant d’autres) par la presse musicale britannique comme les énièmes sauveurs du rock au point d’être déclarés auteurs d’un des cinq meilleurs disques anglais de tous les temps (rien que ça !), d’autres groupes moins solides, moins talentueux, moins humbles, auraient certainement viré différemment. Les Monkeys n’allaient pas choisir d’engloutir leurs royalties sous des montagnes de drogue pour livrer au final un deuxième album bâclé ou au contraire trop longtemps remâché pour masquer une inspiration en berne et sorti 5 ans après dans une indifférence quasi-générale. La bande à Alex Turner a su au contraire remettre rapidement son ouvrage sur le métier pour réussir au final un deuxième opus supérieur à son surestimé – bien qu’estimable – prédécesseur.

You used to get it in your fishnets / Now you only get it in your night dress / Discarded all the naughty nights for  niceness / Landed in a very common crisis

Fluorescent adolescent

Les Arctic Monkeys, renforcés d’un nouveau bassiste venu suppléer l’original essoré par la déferlante du succès, ne choisissent pas pour autant la voie de la révolution stylistique. Le groupe évolue toujours entre pop et punk-rock, sur les traces de ses glorieux aînés Strokes, Clash ou Libertines. Mais les Arctic Monkeys affinent ici leur trait, se débarrassent des scories qui venaient alourdir certains titres de leur premier album et gagnent en précision sans perdre en percussion. Et l’urgence qui habite ces chansons leur confère désormais une intensité dramatique nouvelle et une dimension cinématographie étonnante. On imagine ainsi sans peine quelques uns des titres de ce Favourite worst nightmare accompagner des scènes de film noir, dans lesquelles Alex Turner arpenterait le pavé mouillé d’un quartier glauque, le souffle court, poursuivi autant par une bande de brigands patibulaires que par le parfum entêtant d’une femme forcément fatale.

Well the morning was complete / There was tears on the stirring wheel dripping on the seat / Several hours or several weeks / I’d have the cheek to say they’re equally as bleak !

Do me a favour

Les Arctic Monkeys demeurent redoutables dans l’art de la bombinette pop-punk qui dégage les oreilles comme elle coupe le souffle, tel ce Brianstorm à réactions qui ouvre l’album pour tracer à toute berzingue le portrait vachard d’une tête à claques. On soulignera aussi la capacité des Monkeys à entraîner leur rock à guitares sur le dance-floor, comme sur ce If you were there, beware aux déhanchements ska-funk ou sur Old yellow bricks. Avec Fluorescent adolescent, le groupe s’offre même un classique instantané, portrait tendre et cruel d’une dame qui voit les années passer et ses charmes lentement se faner. Les Arctic Monkeys brillent également sur un Do me a favour tout en mid-tempo inquiétant et surtout sur l’ahurissant 505 terminal, sommet morriconien de l’album, qui annonce ici le souffle lyrique des Last Shadow Puppets avec lesquels Alex Turner s’offrira une fantastique escapade l’année suivante le temps d’un album. Avec cette chanson fiévreuse et bouleversante, Alex Turner offre un final à suspens à un album proprement remarquable, et qui pour le coup confirme davantage les qualités du groupe que son premier opus.

I’m going back to 505 / If it’s a 7 hour flight or a 45 minute drive / In my imagination you’re lying waitin’ on your side / With your hands between your thighs

505

Les Arctic Monkeys poursuivent depuis leur bonhomme de chemin, deux albums étant parus depuis : Humbug (2009) que je suis en train de découvrir et Suck it and see (2011).

3 commentaires sur « Série noire »

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