1 année, 10 albums : 2011

Petite respiration aujourd’hui pour sortir ce blog des années 1990 et poursuivre le compte à rebours de mes tops 10 annuels. J’avoue avoir eu beaucoup de mal à faire cette sélection, notamment une fois les six ou sept premiers disques de cette liste classés. Nombre de prétendants valeureux ont été recalés et auraient pu mériter une mention, comme par exemple Apocalypse de Bill Callahan ou Happy soup de Baxter Dury. Au final, comme souvent, le rock américain tient le haut du pavé, s’adjugeant la moitié de ce classement, avec une Canadienne en surplus pour prendre la première place. La musique d’ici se taille une jolie place d’honneur, avec le vétéran – et regretté – Daniel Darc et la révélation des prometteurs François & the Atlas Mountains. La sélection m’apparaît aussi relativement équilibrée entre valeurs sûres (PJ Harvey, Daniel Darc, Feelies) et jeunes pousses (Metronomy ou Real Estate). Celle-ci demeure éminemment et évidemment subjective, vous aurez sans doute d’autres avis mais peut-être cette liste pourra-t-elle vous faire découvrir quelques belles choses. A vous de juger, et n’oubliez pas de cliquer sur le titre des albums pour écouter un extrait.

Depuis Bordeaux, François & the Atlas Mountains se révélait à la face du monde avec ce troisième album d’une maturité ébouriffante. Entre mer et marais, le disque ondoie comme un fleuve et brasse nombre d’influences avec une fluidité de geste remarquable. Entre sonorités africaines, pop française aux idées larges et indie-rock à l’anglaise, François & the Atlas Mountains apparaissait en pleine lumière et démontrait les précieuses qualités d’un groupe sans collier, ouvrant devant nos oreilles un paysage foisonnant de plages et de plaines.
Sur ce deuxième album impeccable, ce groupe originaire du new Jersey délivre une dizaine de chansons fluides et mélodieuses, gorgées d’arpèges délicats et de guitares à la mélancolie lumineuse. Profondément addictives, les morceaux de Days s’impriment durablement dans nos cerveaux, nous enveloppent de leur chaleur amniotique et révélaient à nos oreilles un groupe ami qu’on a régulièrement suivi depuis.
Après l’acoustique givrée de son premier album, Justin Vernon (aka Bon Iver) sortait de sa cabane en bois pour aller à la rencontre de l’hiver. Invitant dans ses chansons une palette instrumentale élargie (cuivres et vents aussi bien que des boucles électroniques), Bon Iver navigue ici entre le brouillard et le dégel, dans un entre-deux un peu flou où le monde apparaît sous un jour différent. Entre country planante et folk brumeux, Bon Iver, Bon Iver se dévoile comme un paysage enneigé au lever du soleil.
Avec leur deuxième album, les New-yorkais transforment en beauté l’essai remarqué de leur premier LP paru un an plus tôt. Le groupe continue de naviguer entre mélodies jangle-pop sous haute influence smithsiennes et rythmiques syncopées à la mode post-punk. The Drums parvient surtout à mêler lyrisme romantique et économie de moyens pour nous offrir une suite de chansons acidulées qu’on aime à garder sous la langue pour en extraire tout le suc.
L’immense PJ Harvey explore sur son 10e album sa relation à son pays natal et à son histoire, entre amour viscéral de ses paysages et dégoût de son passé guerrier. Au-delà du concept, Let England shake est un nouvel album de premier ordre offert par la géniale Anglaise. PJ Harvey s’éloigne toujours plus de ses anciennes amours rock pour s’aventurer vers une pop adulte jamais ronronnante, nourrie d’airs folkloriques et capable d’exprimer dans un même élan rage rentrée et admiration éblouie. Du grand art, comme (presque) toujours.
Vingt ans après sa dernière sortie, le fondamental groupe d’Haledon, New Jersey, revenait dans une forme éclatante avec un disque lumineux comme à ses plus granfes heures. Menées par des entrelacs de guitares carillonnantes et portées par une rythmique calquée sur les battements de nos coeurs, les chansons des Feelies naviguent entre acoustique et électrique avec une grâce euphorisante, et nous rappellent à quel point ce groupe nous est précieux.
Avec ce disque sans âge mais pas sans racines, Jonathan Wilson, producteur reconnu auprès de quelques fines fleurs de la scène rock US, se frotte avec brio à une succession de prédécesseurs prestigieux, et rassemble sous son cerveau fumant 40 ans de rock anglo-saxon aux idées larges. Traçant un pont entre les richesses mélodiques et harmoniques du folk-rock West Coast et les volutes hypnotiques du psychédélisme anglais (de Pink Floyd à Radiohead), Jonathan Wilson livre un disque d’une ambition assumée, digérant à merveille une discothèque richement remplie, et mâtinant le tout d’une forme de spiritualité panthéiste assez fascinante. Un grand disque fleuve pour amateur de grands espaces.
En accord avec les images suscitées par son titre, The English riviera aligne une dizaine de chansons alternant entre averses et éclaircies. Surtout, ce troisième album de Metronomy les voit arpenter des territoires plus pop, multipliant les airs à siffloter et les harmonies vocales, le tout frotté aux sonorités électroniques qui marquèrent les débuts du groupe. Au bout du compte, The English riviera s’avère une éclatante réussite, au charme bancal et aux mélodies imparables devenues nos amies pour la vie.
Sept ans après l’extraordinaire Crèvecoeur, l’ex-leader de Taxi Girl démontrait que son état de grâce n’était pas terminé avec ce nouveau chef-d’oeuvre, qui sera malheureusement son dernier. Moins grave et homogène que son bijou de 2004, La taille de mon âme papillonne selon les humeurs de son créateur, entre saillies rock et ballades sublimes emplies de nostalgie et de religiosité. Entre orchestrations haut de gamme, emprunts au cinéma et à son Panthéon rock, l’album nous hisse à des sommets stupéfiants de beauté, d’où la vue apparaît dégagée sur le passé et l’avenir.
En refusant de surfer sur le succès de son très aérien The reminder de 2007, la Canadienne nous offrait en 2011 ce disque exceptionnel, à la beauté sauvage et indomptée. D’une beauté âpre, chargées de vent et de poussière, les chansons de Metals dégagent une puissance organique ébouriffante, abreuvées de pop orchestrale, de folk et de gospel. A la fois brut et sophistiqué, Metals faisait passer son autrice dans une autre dimension et demeure près de quinze ans après un des grands disques de ce premier quart de siècle.

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